mardi 30 septembre 2008

Alléluia


Dernier dimanche de septembre, il est 10h30, les cloches sonnent à toute volée, faisant définitivement sortir de leur torpeur les derniers adeptes de la grasse matinée.
Des personnes d’un âge respectable, pour ne pas dire canonique, se pressent à l’entrée de l’église afin de ne pas manquer le début de la messe, que dis-je, de la grand-messe de rentrée.
Des familles sur leur trente et un, robe à col Claudine pour les petites filles, gilet chic pour leurs frères, entrent sagement aux côtés de leurs parents, tout aussi collet monté.
Tout ce beau monde prend place, non sans avoir pris soin auparavant de saluer charitablement quelques connaissances.
Les curés, j’en compte au moins cinq, sont en retrait, discrets, tandis que musiciens, catéchistes et enfants de chœur s’affairent autour de l’autel.
Et c’est parti pour une heure et demie ! Prières, homélies, chants habituels, paroles melliflues bercent l’assemblée. Les fidèles sont ravis, le soleil darde ses rayons dans la nef, comme pour réchauffer vieux os et vieilles pierres. Pour un peu, je m’endormirais… quand tout à coup, une petite voix me susurre à l’oreille : « tu ne trouves pas que ça sent bizarre ? On dirait des épices… ».
- C’est de l’encens…
- Ah !… j’aime pas cette odeur.
Moi non plus, je n’aime pas ces effluves âcres. Je me contente de sourire.
Arrive enfin le moment de la délivrance, de la communion, pardon ! Et avec votre esprit… Je songe au moment où la porte va s’ouvrir de nouveau, où le prêtre va laisser s’échapper ses ouailles, lorsqu’une autre petite voix, toute fluette, s’élève au bout du rang :
- Dis maman, pourquoi eux, ils ont le droit de manger un gâteau et pas moi ?…
Ça y’est ! les portes s’ouvrent, les fauves sont lâchés. Certains jouent des coudes pour se frayer un chemin jusqu’aux tables disposées à l’entrée, sur lesquelles gourmandises salées et sucrées ainsi que breuvages divins les attendent.
Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour… Voilà que je retrouve à la boulangerie les paroissiens qui ont dédaigné le pot de l’amitié… « Alors, c’était beau, hein ?… Vous avez vu madame Machin ?… Mais si ! elle était à côté de monsieur Truc… »

J’ai porté ma croix, j’ai fait ma BA – c’était le jour où jamais – amen !

samedi 20 septembre 2008

Jamais content !

Alain, merci ! Le titre de votre chanson exprime parfaitement ce que j’ai à dire. Pourquoi chercher midi à quatorze heures ?
Ces temps-ci, je ne sais pourquoi, à chaque fois que je croise une connaissance, j’entends la même litanie : j’en ai marre de mon boulot… j’me plais pas à Brest, j’veux r’tourner à Paris… je suis hyper déçue, je voulais une fille, ce sera un garçon… et patati et patata… Ils ne sont jamais contents, j’vous dis !
Bien sûr, on peut avoir des regrets. Bien sûr, on peut être déçu. Bien sûr, on peut avoir très envie de prendre ses cliques et ses claques et brandir cette éventualité comme une menace. Mais qu’y puis-je ? Pas grand-chose. Ah si ! je peux vous écouter, vous entendre, opiner du chef d’un air compatissant… et quelque peu hypocrite… Je peux même amorcer un début de conversation, histoire de tisser un fil ténu entre nous, histoire de ne pas rompre le vrai dialogue qui, peut-être, est sur le point s’installer… J’y crois encore, je me dis qu’il est dans l’intérêt de tous de « positiver ». Alors, je vous adresse un sourire, même si cette idée, à moi, ne me sourit guère, je m’approche de vous, je tente l’humour policé, la boutade gentille et légère, et puis… et puis… zut ! J’abandonne – intérieurement – et je prends congé, contrariée. Bravo ! vous avez gagné ! Vous avez réussi à me communiquer votre blues. Vous l’ignorez, mais je vous en veux. Et je m’en veux aussi. Pourquoi vos propos ne glissent-ils pas sur moi comme la savonnette sur la peau ? Pourquoi faut-il donc que vos plaintes trottinent dans ma tête ? Serait-il possible de trouver sur mon chemin quelque nature optimiste, qui sache tout du moins apprécier les petits cadeaux que la vie offre, de temps en temps, à qui sait les recevoir ? Serait-il possible que vous laissiez de côté vos soucis, si légitimes soient-ils, et que vous ne m’en fassiez point profiter ? Car, égoïstement, j’ai besoin de vos sourires, de vos visages familiers qui me rappellent que j’existe dans ce bas monde.
J’ai bien envie de signer un pacte avec vous : d’abord, soyons heureux de nous revoir, souriez-moi. Puis, éventuellement, si vous ne pouvez faire autrement, livrez-moi le fond de vos pensées, un peu seulement, juste un peu… La rue n’est pas propice aux confidences…

jeudi 11 septembre 2008

Ground Zero



À quelques pas de Wall Street, j’ai aperçu des engins de chantier et des ouvriers qui s’affairaient. J’ai entrevu un vaste chantier hérissé de grues, protégé par de hautes grilles.
J’ai entendu un vigile, ou peut-être était-ce un policier, hurler à chaque fois qu’un touriste tentait de grimper sur un muret pour regarder ce qui se tramait de l’autre côté de cette muraille des temps modernes.
En fait, je n’ai rien vu. J’ai juste écouté, imaginé ce qu’il y avait avant, éprouvé une sorte de vertige, une sensation étrange, indescriptible…
Ground Zero, cette plaie béante se refermera-t-elle un jour ? Sept ans après, elle est toujours à vif. New York n’a pas fini de panser sa chair meurtrie…